Bonjour,
Je suis Susana Jourdan. Je travaille depuis quinze ans sur la durabilité en tant qu’animatrice de LaRevueDurable, que j’ai fondé avec mon époux Jacques Mirenowicz. Aujourd’hui, je suis très heureuse d’être ici. Car le thème de cette marche est l’amour. Or, je suis convaincue que l’amour est la seule force suffisamment puissante et positive pour s’opposer aux causes du changement climatique.
Cette conviction est apparue lorsque notre fille Lucie est née, en 2008, puis notre fils Paul en 2010. Pour elle, pour lui, pour nos enfants, nous ferions n’importe quoi. Nous faisons ou avons fait tout ce qui est nécessaire pour les protéger, satisfaire leurs besoins matériels, les éduquer, leur apprendre les valeurs du partage, les aider à grandir. Mais maintenant, nous devons aussi agir pour assurer que le climat restera hospitalier pour eux. Car le réchauffement climatique menace tout ce que les mères et les pères veulent pour leurs enfants : santé, sécurité, un monde plein de belles choses à découvrir et un avenir plein de promesses.
Beaucoup de parents ignorent cette vérité. Beaucoup d’autres s’efforcent de ne pas y penser. Les grands-parents pour le climat, que je sais sont nombreux ici, portent ce message d’amour en lien avec le réchauffement du climat.
Evidemment, l’amour filial n’est qu’une forme d’amour parmi d’autres. Comme beaucoup d’entre vous, je me sens très concernée par le sort des réfugiés. A la rentrée scolaire, huit adolescentes, Erythréennes et Syriennes, sont arrivées dans une école à Fribourg. Toutes sont enceintes, violées par les passeurs. Il est très facile d’imaginer que la violence du changement climatique fera encore plus régner la loi de la jungle. Et que les femmes et les enfants, plus vulnérables, seront les premiers touchés. Ne pas agir, c’est multiplier les Aylan et tous les visages anonymes que nous avons vu dans la presse cet été. C’est faire le lit des extrémismes et de la barbarie. C’est tourner le dos au meilleur de ce que peut offrir la civilisation.
L’amour pour sa terre, ses paysages, son environnement est une autre motivation très forte pour agir. Ces dernières années, nous avons vu des gens de tous horizons, des peuples indigènes, des paysans, des gens comme vous et moi faire de la résistance, de la désobéissance civile pour protéger leur terre de l’appétit insatiable des foreurs en tous genres.
A quelques centaines de kilomètres d’ici, en Allemagne, des populations se battent contre des extensions de mines de charbon. Aux Etats-Unis, cet été, des centaines de kayakistes ont tenté d’empêcher la plate-forme pétrolière de l’entreprise Shell de rejoindre l’Arctique.
Ici aussi, en Suisse romande, des gens se mobilisent contre les gaz de schiste. Et nous avons une occasion en or d’exprimer notre attachement à notre beau pays et à un élément fort de son identité : les Alpes. En février 2016, nous voterons sur la construction d’un deuxième tunnel au Gothard.
Nos enfants, nos semblables, nos écosystèmes. Nous y tenons tous. Tous… sauf une petite minorité, qui fait tout ce qu’elle peut pour que la température augmente de 4 à 6 degrés Celsius. Autant dire l’enfer sur Terre. Cette minorité est responsable des entreprises de pétrole, de charbon et de gaz. Elle se frotte les mains lorsque l’Arctique fond.
Les entreprises d’énergies fossiles ont déjà trois fois plus de réserves d’énergies fossiles dans leurs livres de comptabilité que ce que l’atmosphère peut absorber sans dépasser le seuil critique de 2 degrés de réchauffement, qui est déjà gigantesque. Pourtant, à Paris, il ne sera absolument pas question de cette minorité. La diplomatie internationale travaille depuis vingt-trois ans à contenir les émissions de gaz à effet de serre sans jamais s’intéresser à la production de combustibles fossiles. C’est un peu comme prétendre lutter contre la consommation de drogue sans jamais s’intéresser aux champs de pavots.
C’est pourquoi j’aimerais vous inviter à rejoindre la campagne de désinvestissement des entreprises d’énergies fossiles. Et à demander à l’AVS, aux caisses de pension, aux compagnies d’assurance et aux banques que tous retirent leur argent de cette industrie, car cet argent sert à extraire toujours plus de combustibles fossiles que nous ne devons absolument pas brûler. C’est une ligne d’action nouvelle, particulièrement pertinente en Suisse. L’Office fédéral de l’environnement vient de publier un rapport qui dit que la place financière suisse favorise, par ses investissements, une hausse de la température de +4 à +6 degrés Celsius.
Les possibilités de s’engager pour le climat sont par ailleurs très nombreuses. Plein d’associations présentes ici travaillent sur toute une série de moyen d’agir. Renseignez-vous, rejoignez-les, mettez-vous en chemin.
Pour conclure, j’aimerais vous inviter à vous connecter à vos émotions, à votre cœur. Ne plus nier, ne plus remettre à demain, ne plus essayer d’éviter les sentiments négatifs qui arrivent souvent quand on pense à ce problème. Si nous acceptons ces émotions, nous trouverons en nous les ressources pour nous engager. Pleinement. Avec tout notre cœur.
Je vous remercie !
Susana Jourdan, 28 novembre 2015