Cher s amiEs, Une fois de plus nous sommes réunis dans les rues de Genève. Nombreux, engagés déterminés et solidaires.
Depuis des années les crises économiques et écologiques se multiplient et il est devenu urgent de changer nos pratiques de consommation et de production.
Depuis le sommet mondial de Rio il y a maintenant plus de 20 ans, les grandes puissances se réunissent lors de forums internationaux sur le climat afin de réduire les émissions de gaz à effet de serre. Aujourd'hui le spectacle reprend avec pour scène la COP 21, 21eme conférence des Nations Unies sur les changements climatiques. Mais nous continuons d'assister à la mise en place d'immenses projets polluant et néfaste comme par exemple l'agrandissement de l'aéroport de Genève ou encore le dédoublement du Tunnel du Gothard.
La structure des échanges commerciaux et de l'économie mondiale reste inchangée.
Cette mascarade se caractérise une fois de plus par une absence de solution, car cette fois encore la classe dirigeante prend les décisions à notre place dans un processus antidémocratique de gouvernance mondiale. Nous dénonçons l'hypocrisie d'un tel rassemblement et nous agissons indépendamment du théâtre de la COP 21.
L'exploitation des matières premières au Sud du globe par les multinationales et pays riches amenant à la délocalisation de la production, nous montrent que le colonialisme et le rapport de domination à l'échelle mondiale persistent
Les agriculteurs qui travaillent la terre pour nous procurer des produits locaux et de saisons, sont exploités par la grande distribution qui tire les prix vers le bas face à la concurrence des produits étrangers. Leur salaires n'est pas rémunérateur et cela dévalorise leur travail ! En Suisse 2000 exploitations mettent la clé sous la porte chaque année. Ou est passé notre soutien pour nos paysans ? Le rôle essentiel de ce secteur est bafoué.
Oui, de grands pétroliers continuent de circuler abondamment dans nos océans, des camions de marchandises déferlent sur les autoroutes, et oui nous continuons de voir dans nos supermarchés des denrées alimentaires importées par avions depuis l'autre bout de la planète.
Notre génération, nous n'avons pas connu le plein emploi et nous devons trouver notre place sur un marché du travail dominé par l'argent et la compétitivité. Nous n'avons pas connu les Trente Glorieuse nous ne croyons pas à l'infinie croissance économique et aux besoins toujours plus nombreux et inutiles qu'elle engendre. Nous n'avons connu que les crises d'une société consumériste et individualiste qui ne fonctionne pas.
Les mots « compétitivité », « croissance » « profits » « propriété privé » « bénéfices » que nous entendons dans les discours politiques et économique depuis notre plus tendre enfance, nous n'y croyons pas et nous n'acceptons pas que ces valeurs s'immiscent quotidiennement dans nos relations avec notre environnement et les personnes qui nous entourent. Ce système de valeurs qui nous est imposé par le discours dominant n’est pas le nôtre.
C'est à nous qu'il appartient désormais de faire vivre les valeurs qui nous animent tel que l'amour, le bien commun, le partage, la solidarité, afin de repenser ensemble les bases d'un monde nouveau.
Chers amiEs, aujourd’hui, si nous sommes présents en si grand nombre, c’est que le monde et les valeurs de la COP 21 nous sont quotidiennement imposées et ne nous correspondent absolument pas. Le système unilatéral imposé par les dirigeants ne nous représente en rien et c’est pour cela que nous descendons dans les rues nous représenter nous-mêmes sans attendre que l’on nous expose encore de jolies fables lavées de vert.
Les solutions aux problèmes écologiques, c’est nous, et c’est vous. Ce sont toutes les personnes déterminées à y mettre un terme, en choisissant d'organiser les alternatives. Ce sont toutes les personnes ici présentes et dans les deux-milles autres villes du globe où les consciences émergent et unissent leurs forces.
Nous vous appelons aujourd’hui à refuser, et à détruire les valeurs de ce système qui portent à notre perte. Nous vous appelons à le reconstruire, à le repenser pour offrir à notre monde de nouvelles bases. Des bases axées sur la solidarité, la relocalisation de l’économie, la propriété collective des lieux et de nos outils de travail. La nature et les principes de l’écologie sont une priorité de par leur importance. Nous voulons des rapports politiques horizontaux et non plus verticaux, libre de rapports de domination. Les processus organisationnels devront se faire sur le principe de l’autogestion. Nous entendons par cela que dans tout groupe d’action, associatif, professionnel ou politique les processus décisionnels soient effectués par l’ensemble des personnes de chacune de ces structures.
Partout dans le monde, à toutes les échelles de la société, les résistances s’organisent sur ce modèle. Nous pouvons citer comme exemple les organisations d’étudiants et d’ouvriers en lutte actuellement pour leurs droits, les mouvements d’occupation de bâtiments, les associations citoyennes pour le droit des migrants tout comme No Bunker. Cet automne, Alternatiba nous a prouvé à sa manière qu’un autre monde est possible. Aujourd’hui, c'est au tour de L'Usine de montrer les dents pour faire valoir une culture alternative.
Quant à la problématique écologique actuelle, elle ne sera résolue que par des changements drastiques dans les systèmes agricoles. Pas de révolution sans un retour à la terre. Pas de solution si nos paysans disparaissent. Pas d’avenir possible si nos terres deviennent stériles. Des alternatives sont déjà en place et ne demandent qu’à prendre de l’importance. Les paysans organisés en syndicats comme Uniterre ont déjà pris les devants. Longo maï, coopérative paysanne européenne, fonctionnent sur des principes écologiques et d'autogestion. Enfin, les agriculteurs pratiquant des contrats de vente directe se sont organisés en fédération au niveau romand. Tout ceci représente un réel espoir. Nous espérons que la jeunesse, dont nous faisons partie, s’appliquera à retourner travailler la terre, car celle-ci nous appartient.
Si l’on veut aujourd’hui freiner le réchauffement climatique et toutes les nuisances qui lui sont conséquent, ce n’est pas vers Paris qu’il faut se tourner. Mais c’est bien vers nous-mêmes et vers tous les groupes qui pratiquent l’autogestion avec la conscience des enjeux écologiques. Nous n’attendrons pas que l’État ou n’importe qui nous donne le feu vert pour mettre en place des alternatives sociales et écologiques durables. Coûte que coûte, nous resterons libres.
Discours écrit collectivement par les membres du CollectifCOP21, jeunes et étudiants, interprété par une étudiante en Géographie & Environnement et un étudiant de l'HEPIA, le 28 novembre 2015